Sûr que la qualité ne sera pas touchée; un nettoyage aura lieu, il était temps.
Quant à cette "crise", elle n'en est pas une; c'est un bouleversement et une mise en cause de beaucoup de choses; Internet jouera son rôle positif l a dessus.
Dans ce contexte, je conseillerai de lire un petit best seller s'appelant: Le Cygne Noir (reçu à Noel
)
Un Quotidien Algérien (Le Quotidien D'Oran) en parle à sa manière:
Jâaimerais revenir sur le récent scandale de la fraude au sein de la Société Générale. Que mes amis qui travaillent sur les marchés financiers, et que ma dernière chronique sur les banques a quelque peu heurtés, se rassurent. Je ne vais pas remettre le couvert (quoique..). Mon idée est plutôt de vous faire connaître les réflexions, pour ne pas dire les pensées, dâun personnage de plus en plus influent dans le monde de la finance, mais aussi dans celui des idées et de la philosophie. Lâhomme sâappelle Nassim Nicholas Taleb, il vit en Grande-Bretagne (Note de Dabsi: Il vit à NYC) et câest à la fois un philosophe, un mathématicien et un financier.
De lui, on dit quâil est le
« penseur de lâincertitude ». Câest son dernier livre,
« The Black Swan », autrement dit
« le cygne noir », qui peut servir de clé de lecture à certains des événements spectaculaires quâa connus la planète au cours des dernières années. Quâest-ce quâun
« cygne noir » ? Câest, affirme Taleb,
« tout ce qui nous paraît impossible si nous en croyons notre expérience limitée ». Lâexpression a du sens. Dans lâhémisphère nord, tous les cygnes sont blancs. A force de les observer, on pourrait conclure quâil nâen existe pas dâune autre couleur. Et puis, un jour, on prend lâavion pour lâAustralie et on découvre, interloqué, que, là -bas, les cygnes sont tous noirsâ¦
Pour mieux préciser les choses, Nassim Nicholas Taleb estime que le
« black swan » est un événement qui possède trois caractéristiques. En premier lieu, il sâagit
« dâune observation aberrante », car rien, dans le passé, nâa laissé prévoir de façon convaincante et étayé sa possibilité. Quâun trader lambda puisse faire perdre 5 milliards de dollars à la Société Générale nâa ainsi jamais fait partie des hypothèses plausibles au sein de cette banque qui a longtemps été perçue comme efficace en matière de contrôles internes.
En second lieu, cet événement inattendu a des considérations considérables.
« Considérez le grain de poivre et mesurez la force de lâéternuement », dit un proverbe persan. Et câest bien de cela quâil sâagit. Jérôme Kerviel, par ses agissements supposés, a mis en branle une mécanique dont on ignore encore toutes les conséquences. Certes, la Société Générale semble décidée à se battre pour continuer à rester indépendante mais personne ne peut affirmer aujourdâhui quâelle ne sera pas rachetée par lâune de ses concurrentes. Pire, qui peut exclure que dâautres fraudes ne seront pas découvertes dans les prochaines semaines et, de toutes les façons, qui peut affirmer à cent pour cent que la
« Soc Gen » se relèvera de ce scandale ?
La troisième et dernière caractéristique est liée à la nature humaine et à notre besoin permanent de rationaliser et de donner de la cohérence au monde et aux événements qui nous entourent. Pour le philosophe, le
« cygne noir » est aussi un événement vis-à -vis duquel nous
« élaborons toujours après coup des explications qui le font paraître plus prévisible et moins aléatoire » quâil nâétait vraiment. En clair, câest un événement dont nous cherchons coûte que coûte à gommer le caractère inattendu ou improbable.
A ce sujet, les attentats du 11 septembre sont un exemple parfait. Personne ne les a vus venir, ils ont déclenché une onde de choc qui nâen finit pas de bouleverser la planète, mais tout le monde ou presque affirme aujourdâhui quâils étaient prévisibles, voire que lâon pouvait les empêcher. Dans le cas de la Société Générale, on nous explique ici et là que des alertes avaient été lancées par des opérateurs de marché. On insiste aussi sur le fait que des traders indépendants avaient repéré quâun opérateur jouait gros notamment sur Eurex, le marché allemand de produits dérivés.
Tous ces signes avant-coureurs que les médias énumèrent sont censés nous convaincre que lâon aurait pu détecter la fraude avant quâelle ne débouche sur la catastrophe que lâon sait. Après coup, cela a le mérite de nous rassurer et il suffit de dire quâil faudra être plus vigilant à lâavenir pour que cela ne se reproduise plus. Câest une manière commode dâévacuer le fait que lâon ne peut pas toujours prévoir lâimprévisible et quâil y a des événements dont il faut admettre quâils échappent à notre entendement.
Ce quâil y a dâintéressant dans la réflexion de Nassim Nicholas Taleb câest quâil sâen prend à un grand pan de la philosophie classique en critiquant par exemple les platoniciens parce quâils ont encouragé lâêtre humain à préférer
« des théories simples à la réalité confuse ».
Au lieu dâélaborer une pensée
« probabiliste complexe », nous continuons à voir le monde à lâaune de la courbe de Gauss, câest-à -dire, quelques rares extrêmes de part et dâautre et une cloche où se concentre la plus grosse moyenne. Or, justement, les
« cygnes noirs » sont autant dâévénements pour lesquels la courbe de Gauss nâest pas valable. Lâoccurrence de tremblements de terre, de tsunamis ou de crises financières ne peut se décrire quâavec des modèles mathématiques plus compliqués que la courbe de Gauss.
En partant de ces constatations, Taleb propose un prolongement intéressant du concept de
« cygne noir ». Pour lui, nous ignorons le monde tel quâil est parce que nous pensons que, grosso modo, nous partageons tous le même quotidien. Or, la réalité, câest que notre monde est de plus en plus régi par des éléments qui échappent à la courbe de Gauss et que le philosophe qualifie
« dâExtremistan » ce qui, en employant une expression triviale, pourrait se résumer par
« un monde de toujours plus et dâencore plus ». Les exemples sont légions. Les milliardaires dont le nombre ne cesse dâaugmenter quand celui des pauvres est loin de diminuer. Les salaires dans les organisations où le sommet gagne toujours plus quand le reste du personnel voit sa fiche de paie inchangée.
A cet égard, les Banques sont une bonne illustration et les chiffres dont il a été question quand le scandale de la Société Générale a éclaté ne sont que la partie apparente de lâiceberg. La réflexion de Taleb vaut aussi pour les livres. Dans la masse impressionnante dâouvrages qui sont publiés chaque année, la plus grosse part des ventes va à des best-sellers
« qui sont de moins en moins nombreux mais qui se vendent encore mieux ». En littérature comme en finance, il semble bien que câest la loi de lâExtremistan qui règne désormais.
©Le Quotidien dâOran
Bonne Année à Toutes et à Tous