L'inflation reste un fléau pour la BCE, la baisse des taux peut attendre
FRANCFORT (Allemagne) - L'inflation reste l'ennemi à abattre pour la Banque centrale européenne (BCE) et la baisse des taux directeurs en zone euro n'est certainement pas d'actualité, comme il ressort du bulletin mensuel de l'institut et d'un responsables de la BCE jeudi.
Le pétrole cher et l'envolée des prix des denrées alimentaires vont maintenir les taux d'inflation à "des niveaux élevés pour plus longtemps que prévu initialement", a prévenu jeudi l'Allemand Axel Weber, membre influent de l'institut monétaire.
Il a qualifié d'"inquiétante" la poussée des prix en mars dans la zone euro, qui ont atteint 3,6% sur un an, du jamais vu depuis le début de la zone euro en 1999.
"A moyen terme, la persistance de prix de l'énergie élevés et d'une inflation des prix des aliments a de quoi sérieusement inquiéter", a-t-il martelé, selon le texte d'un discours prononcé à Francfort, exhortant de nouveau les partenaires sociaux à la modération salariale afin d'éviter de grimper à des niveaux "intolérable" d'inflation dans l'avenir.
Et dans son bulletin mensuel paru jeudi, la BCE a réaffirmé l'absolue priorité à la lutte contre l'inflation: "(...) il n'y a certainement aucune marge pour la complaisance dans ce domaine".
Les inquiétudes pour la croissance sont de nouveau reléguées au second plan, malgré les menaces pour l'économie liées à la crise du crédit et les difficultés des Etats-Unis, qui flirtent avec la récession.
Pour M. Weber, "un pessimisme exagéré concernant la croissance est une mauvaise attitude dans le contexte actuel".
Les fondamentaux économiques en zone euro sont "sains". La grande inconnue reste l'impact de la crise financière sur l'économie réelle, d'autant plus que "les tensions (sur les marchés financiers) pourraient durer plus longtemps que prévu initialement", estime parallèlement la banque centrale dans le rapport.
Mais pour le moment, elle ne relève pas "de signes significatifs" montrant une dégradation des conditions du crédit.
Alors que la Réserve fédérale américaine (Fed) devrait de nouveau baisser ses taux fin avril pour éviter au pays de sombrer dans une récession et que la Banque d'Angleterre a elle aussi desserré la vis pour soutenir son secteur immobilier, la BCE fait clairement savoir depuis plusieurs semaines qu'elle compte attendre avant d'agir éventuellement. Au grand dam d'industriels qui souffrent de la force de l'euro dans leurs exportations.
Les grands instituts économiques allemands ont en revanche accordé à l'institut un satisfecit en jugeant cette position adaptée, dans leur rapport de printemps publié jeudi.
Le conseil des gouverneurs pense que l'actuel cap de politique monétaire va "contribuer à atteindre" son objectif de stabilité des prix, selon le rapport, façon d'annoncer un statu quo sur les taux pour un bon moment.
La plupart des économistes estiment que la BCE ne bougera pas avant l'automne, certains qu'elle ne baissera pas du tout ses taux.
Le principal taux directeur de la zone euro se situe à 4% depuis juin, contre 2,25% aux Etats-Unis. Un différentiel qui alimente la force de l'euro.
Mais pour M. Weber, l'euro fort a un grand avantage, celui de freiner l'inflation des produits importés, comme les matières premières.